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« En est-on vraiment là ? »

Tribune du 4 décembre 2020 de Judith Thiébaut.

Mardi 17 novembre nous nous sommes rendus avec un ami à la manifestation à Valence contre la loi interdisant de filmer et diffuser les violences policières. Beaucoup de messages nous avaient avertis de la manif, malheureusement aucun pour nous dire qu'elle avait été interdite au dernier moment.

Nous arrivons donc sur la place à l'heure dite pour y découvrir trois ou quatre camionnettes de la gendarmerie, les gendarmes et une dizaine de policiers entourant une place morte. On a traîné quelques minutes sur la place, le temps d'apprendre que la manifestation était annulée puis on est repartis en direction de notre voiture.

On n'avait pas fait 400 mètres sur les boulevards que cinq policiers à moto nous ont encerclés et demandé ce que l'on venait faire ici. Nous avons expliqué l'affaire et présenté nos attestations, puis nos papiers comme ils nous l'ont demandé et c'est là qu'on a eu droit à une amende de 135 euros au prétexte que notre attestation n'était pas valable ; je vous épargne tout le pamphlet atroce auquel on a eu droit sur la Démocratie, le droit à manifester et le reste.

Je suis choquée. Il est clair qu'ils nous ont punis d'être venus à cette manifestation : en effet, ils étaitent cinq pour nous arrêter, et n'ont à aucun moment demandé quoi que ce soit aux autres piétons qui circulaient.

Quelques semaines avant, mon fils de 11 ans et son frère de 16 se sont fait interpeller par la police assez rudement, au prétexte qu'ils ne devaient pas fréquenter le skate parc de Crest. La fermeture du skate parc n'avait pourtant pas été clairement annoncée ; ils ne sont encore que des mineurs. Mon garçon de 11 ans était sous le choc et j'ai dû lui expliquer qu'il ne devait pas avoir peur de la police. Je n'ai pas envie que pris de panique, il se mette en danger parce qu'il aurait oublié de sortir avec une attestation et que la police effectuerait un contrôle.

En est-on vraiment là ? Chaque jour, on entend parler d’abus de pouvoir des forces de l'ordre, sous prétexte que les Français ne sont pas assez dociles et qu'il faut les sanctionner. On glisse chaque jour un peu plus vers une violence autoritaire. On n'a pas d'autres choix que de rentrer la tête dans les épaules et relever son masque en priant pour que le policier qui va nous interpeller soit bien luné.

Ce qui se joue ici me remplit de rage et de tristesse. Nous sommes en train de prendre un virage dangereux et liberticide. Et lorsqu'on veut apporter au débat une parole nuancée et demander un peu plus de confiance, de mutualité et de bienveillance, notre discours est stoppé net par le virus de la peur et de la culpabilité ! « J'ai peur donc j'ai raison ! » Aussi je me pose la question : est-ce vraiment ainsi que nous allons sortir de cette crise qui nous affecte tous, dans nos métiers, dans notre vie personnelle, celle de nos enfants et sur le lien social ?

Judith Thiébaut

Tribune publiée dans Le Crestois du 4 décembre 2020

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