MUNICIPALES : Le Covid-19 contamine aussi le scrutin
L'élection municipale a été marquée par une forte abstention. Un second tour sera organisé... Un jour.
Les urnes ont parlé. Mais leur message n'est pas si facile à déchiffrer... Dimanche 15 mars, les électeurs crestois ont placé Hervé Mariton et sa liste "Parce que nous aimons Crest" en tête, avec 43,44% des voix (1.557 électeurs), suivis du duo René-Pierre Halter et Dominique Marcon, de la liste "Ensemble pour Crest", avec 35,41% (1.269 électeurs), et du binôme Samuel Arnaud - Hélène Bertau, de la liste "Réinventons Crest", qui re- cueille 21,15% des suffrages (758 électeurs).
La tenue d'un second tour à Crest est déjà en soi un événement, notamment parce qu'elle place le maire sortant Hervé Mariton en ballotage défavorable. Dès l'annonce des résultats, les listes "Ensemble pour Crest" et "Réinventons Crest" ont en effet annoncé qu'elles se rassembleraient pour le second tour. Si les électeurs qui leur ont accordé leur suffrage dimanche dernier réitèrent leur choix, ils pourraient théoriquement recueillir 56,56% des voix, et donc remporter l'élection.
Théoriquement seulement... Car l'autre fait n table du scrutin, c'est la très faible participation des électeurs crestois : seuls 54,8% se sont rendus aux urnes dimanche (3.018 abstentionnistes pour 6.677 inscrits). Soit 15 points de moins que lors des élections municipales de 2014.
L'effet coronavirus est indéniable, mais les candidats n'en font pas tous la même interprétation. D'après Hervé Mariton, l'abstention a principalement désavantagé sa propre liste : « La participation s'est plus abîmée dans les bureaux de vote qui nous sont favorables que dans ceux qui le sont moins ». Le maire sortant pense aussi que l'abstention est le fait « d'un électorat populaire qui soutient habituellement l'équipe municipale, et d'un électorat plus âgé, les deux étant davantage secoués par la crise sanitaire ».
Un argument inaudible pour Samuel Arnaud : « Il y a clairement une dynamique en faveur d'une alternance à Crest, la liste "Ensemble pour Crest" fait de bons résultats sur tous les bureaux de votes, et la nôtre est allée chercher des voix dans des bureaux habituellement plus favorables à la majorité ». Le candidat assure que « les listes favorables à une alternance à Crest enregistrent 250 voix de plus qu'en 2014, tandis qu'Hervé Mariton perd environ 900 électeurs », avant d'ironiser : « On veut nous faire prendre des vessies pour des lanternes, c'est de bonne guerre, mais ça ne marche pas ».
Pour Dominique Marcon aussi, il est illusoire de penser que l'abstention n'a désavantagé que la liste du maire sortant : « Les personnes qui ne se sont pas déplacées dimanche à cause de l'épidémie sont évidemment des électeurs potentiels de toutes les listes, et non pas exclusivement de celle du maire sortant. Je note également que les électeurs se sont globalement plus mobilisés à Crest que dans le reste de la France, où la participa- tion moyenne est de 44,6% ».
À QUAND UN SECOND TOUR ?
« Il y avait quelque chose d'irréel à organiser ce premier tour », estime aujour-d'hui Hervé Mariton, qui aurait préféré un report du scrutin. À l'inverse, ses concurrents, et en particulier "Ensemble pour Crest", se sont félicités de son organisation. « Nous sommes vraiment très contents que ce premier tour ait eu lieu, et nous saluons la municipalité et l'ensemble des participants pour leur efficacité et leur sérieux face à cette situation inédite », as- sure ainsi Dominique Marcon.
La numéro deux d'Ensemble pour Crest veut en outre profiter du report du second tour pour « apprendre à bien travailler avec l'équipe de Samuel Arnaud, partager nos objectifs, nos priorités et nos méthodes ». Les deux listes sont aujourd'hui prêtes à fusionner et à présenter une liste commune en vue d'affronter Hervé Mariton au second tour.
L'inconnue, c'est désormais la date d'organisation du second tour. Le premier ministre Édouard Philippe a proposé de reporter le scrutin à dans trois mois, le dimanche 21 juin. Mais une amélioration de la situation sanitaire pourrait permettre de le programmer un peu plus tôt. Un projet de loi gouvernemental, qui sera bientôt présenté au parlement, organisera le report du scrutin et prévoira plusieurs mesures, notamment pour permettre aux candidats élus dès le premier tour d'entrer immédiatement en fonction. Ce projet de loi devrait aussi prévoir, pour les communes où un second tour est nécessaire, de prolonger les mandats des conseillers municipaux et des délégués communautaires sortants jusqu'à la tenue du deuxième tour.
En d'autres termes, et pour ce qui concerne la vallée de la Drôme, les élus sortants de Crest et de Livron-sur- Drôme, où un deuxième tour devra être organisé, continueront d'exercer leur mandat jusqu'au second tour. Concrètement, dans les conseils communautaires de la Communauté de Communes du Val de Drôme (CCVD) et de la Communauté de Communes du Crestois et du Pays de Saillans (3CPS), les nouveaux élus côtoieront ceux qui restent en attente d'un deuxième tour.
Un exécutif de transition devrait être mis en place en attendant la fin de cette échéance incertaine. Du côté de la ville de Crest, qui compte 18 élus sur 39 à la 3CPS, « on ne fait pas de cet exécutif provisoire un enjeu, et il n'y a pas de difficulté à ce que les affaires courantes soient gérées par la présidence actuelle », assure Hervé Mariton.
Le coronavirus pourrait donc mettre entre parenthèse les tensions qui traversent l'intercommunalité depuis un certain temps. En tout cas, jusqu'au second tour des élections municipales...
M.C
Article paru dans Le Crestois du 20 mars 2020