Fermeture des classes, ouverture de l’école à la maison
Depuis le 16 mars, les écoles sont fermées pour éviter la propagation du Coronavirus. Ainsi, 12 millions d’élèves scolarisés sont en cours chez eux. Petit tour dans notre vallée.
Des plus petits aux plus grands, les élèves sont face à des outils numériques aidés de leurs parents pour continuer à apprendre et assurer une continuité pédagogique. Certains sont en maternelles et continuent d’apprendre la vie, par des jeux et des dessins.
Plus grands, ils ont accès à des ordinateurs avec l’aide de leurs parents ou, faute de réseau ou de facilité de transmission familialle, les professeurs, enseignants téléphonent ou communiquent par des copies laissées à disposition. Au collège, les ados ont accès aux outils numériques et profitent de la technologie pour participer à des visio-conférences, à des cours à distance, avec leur professeur, comme au lycée.
Le 3 avril, le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, annonçait les dernières dispositions concernant les examens. 2 millions de jeunes seront confrontés à ceux-ci. Pour la première fois en France, le BAC sera attribué sur un contrôle continu, comme le CAP, BEP, le Brevet des collèges et le BTS. Le BAC Français diverge un peu, l’épreuve orale étant maintenue pour le moment, et un contrôle continue sur l’écrit.
Et les mentions, pour entrer dans les grandes écoles… Et bien, pour l’instant, elles sont maintenues comme d’habitude, 12/20, assez-bien ; 14/20, bien et 16/20 très bien.
Alors... « Mieux vaut se prêter à un petit mal que d'en occasionner un grand » (Marquis de Sade)
Voici un petit tour d'horizon dans notre vallée :
BLACONS
Flavie Braux est institutrice aux Berthalais avec des petits de maternelle
A l'école des Berthalais, en maternelle, pas à pas, tout se met en place. Les enseignantes sont engagées depuis plusieurs années dans une pédagogie de l'action et de la manipulation d'objets par les tout-petits. Mettre en place cette pédagogie à distance fut un réel casse-tête. À trois, elles ont à charge les soixante-quatorze élèves de l’école, de la petite section avec des enfants de 3 ans à la grande section, juste avant l’entrée en Cours Préparatoire.
Chaque classe est composée de tous les niveaux et les élèves changent de maîtresse. De cette organisation naît une difficulté supplémentaire car les enfants ont l’habitude de travailler avec plusieurs enseignants.
Elles ont donc décidé de travailler ensemble pour élaborer la planification des travaux à faire chaque semaine. Il ne s’agit pas de former des enfants pour le BAC, mais bien de leur laisser le contact avec l’école . Alors, il y a essentiellement des jeux à faire avec les parents, du dessin et des idées qui évoluent en fonction de l’actualité.
Les débuts par courriels ont été compliqués. Aussi, les enseignantes ont opté pour un outil, "beneylu school". Ce programme informatique permet d’échanger des photos, des messages via internet de manière très protégée, et de lancer des défis aux petits, comme la tour la plus haute, des plantations, du land-art, des parcours dans le jardin et, en retour, les parents envoient des photos pour garder le lien avec l’école.
Et dans cette aventure, les agents présents habituellement dans les classes, participent aussi ! Les enseignantes cherchent encore un peu leurs marques dans cette nouvelle manière de travailler, mais rien que de voir les photos les réjouit et leur renvoie le bonheur des petits qui continuent de suivre les consignes scolaires.
EURRE
L’avis du directeur de l’école
Lionel Sartrand est directeur de l'école primaire d'Eurre et enseignant de Romane. Avec les 166 élèves de l'école, environ 50 maternelles et 116 élémentaires, les enseignants ont mis en place des visioconférences deux fois par semaine, entre profs pour échanger sur les difficultés, les réussites du travail à distance mais également pour poursuivre les démarches nécessaires pour la vie de l'école.
Toutes les classes ont mis en place la continuité pédagogique avec des modalités propres à chaque maître ou maîtresse en ayant à l'esprit de porter une attention particulière aux élèves les plus fragiles. Certains ont besoin de conseils individualisés ou de correspondance plus soutenue pour conserver un lien. Différents outils numériques sont utilisés : blogs pour certains, échanges mails par le biais des boîtes prof, pour d’autres.
En maternelle, les enseignants ont donné des pistes d'activités, des liens, des jeux. Dans l'ensemble le contact avec les familles et les élèves est maintenu mais avec des disparités importantes et quelques familles sont difficilement joignables.
Pour la classe de Romane en classe double, CM1/CM2, Lionel Sartrand appelle chaque famille pour échanger sur l'organisation, donner des conseils et rassurer. Il rappelle dans ses différents messages que l'essentiel est de ritualiser, chaque jour, un moment pour l'école. Les contenus sont essentiellement des révisions, de l'entretien. Certains parents peuvent accompagner leurs enfants, mais pour d'autres familles, les impératifs de travail, la gestion de plusieurs niveaux scolaires, les équipements multimédias et la connectivité constituent des obstacles importants à l'accompagnement scolaire.
Plusieurs enseignants effectuent des photocopies et les déposent près de l'école, car les imprimantes font défaut à la maison.
Il est important de garder à l'esprit que le lien parents/enfants est essentiel et qu'il faut tenter de le préserver. La quantité de travail doit être raisonnable et adaptée lorsque les élèves ont des difficultés. C'est, visiblement, un travail complexe à mettre en œuvre à l'école primaire car les enfants ne sont pas autonomes pour la gestion des outils numériques et il faut veiller à ne pas renforcer les inégalités.
La semaine dernière, certains élèves avaient une baisse de moral. Leur professeur les rassure : « Je leur dis que c'est normal ; le retour à l'école n'aura jamais été aussi attendu ! »
CREST
Noé est en CP à l’ensemble scolaire catholique de Saint Louis
Noé, le petit Aoustois, partage son année de CP avec ses copains en CE1. La classe est double. Cette période de confinement donne l’occasion à ses parents de lui faire classe comme tous les petits et grands élèves de France. Et c’est Noé qui donne son avis sur l’école à la maison : « C'est trop bien, mais les copains me manquent ».
Bon, ce qui arrange bien cette situation est la bonne volonté de cet enfant à travailler et sa passion pour l’école ! Il raconte : «Je travaille 2h le matin avec une récré. L’après-midi, je travaille 1h30 à 2h et je reste en contact avec la maîtresse par mail ». Les parents sont aidés par l’enseignante : « Elle prépare une feuille de route pour expliquer la leçon et elle fournit de nombreux outils pour faire travailler le petit élève. En parallèle, elle a fourni des sites internet qui permettent de nous éclaircir si besoin et des approches différentes de la leçon si l’enfant n’a pas compris du premier coup. L’enfant a aussi sa feuille de route à suivre ! Elle a une organisation au cordeau et ceci nous facilite la tâche, nous sommes donc très sereins, d’autant que l’on peut la joindre à tout moment ». En tant que «bon élève», Noé est rassuré : «Tout continue comme à l’école, leçons, exercices et travaux pratiques».
Les parents de Noé avouent la chance de n’avoir que lui et de suivre déjà sa scolarité. Mais ils pensent à ceux qui en ont deux ou trois enfants et qui les laissent à la garderie… « Ça doit être compliqué pour eux ». Et, avec toute cette organisation, ils concluent : « Malgré les incertitudes liées au confinement, l’école se passe bien à la maison ».
CREST
Romane, en seconde à Armorin, a beaucoup de travail
Romane suit les cours de seconde à Armorin, à Crest et elle découvre les nouveaux modes de travail, en vidéo ou audio avec ses profs et les autres élèves. Les professeurs donnent les cours et les exercices sur du long terme, et en très grande quantité. Alors, l’élève s’organise en fonction, et c’est visiblement bien pour elle.
A Suze, le réseau est parfois lent ou difficile à obtenir, mais dans l’ensemble, elle s’en sort. Car, ce n’est pas nouveau, et toutes les communes ne sont pas desservies de la même manière pour internet ou seulement le téléphone ! Et en ces périodes-là, c’est un vrai handicap.
L’élève donne des exemples : « En histoire, la prof donne des exercices qu’il faut renvoyer. En ce moment, nous travaillons sur les grandes découvertes et nous suivons assez bien le programme. En mathématiques, le prof est en direct au téléphone, en visio. Nous coupons le micro pendant qu’il parle et on lève la main ou on lui met un message si on veut intervenir. Nous sommes 27 ensemble, alors il faut s’organiser ! Mais c’est super bien car il explique à tous la leçon. Pour les langues, c’est une vidéo qui donne les exercices. Et pour l’oral, nous enregistrons et envoyons par internet. Le sport n’a pas lieu mais à la campagne, je peux le faire quand je veux, et finalement, j’en fait plus qu’à l’école ! »
Romane est donc à l’école à la maison selon un planning rigoureux, de 9h à 12h30 et de 14h à 18h, de quoi bien remplir la journée, mais elle a hâte de retourner à l’école. L’ambiance lui manque, manger au self, partager les inter classes, « Même si nous continuons à communiquer, ce n’est pas pareil, le monde des ados me manque ! »
Témoignages recueillis par Corinne Lodier
Publié le 7 avril 2020