Les producteurs locaux et leurs difficultés
En cette période un peu spéciale, les producteurs locaux sont mis en lumière, mais leurs vies sont parfois bien difficiles.
Bertrand Demathieu est installé sur la commune de Gigors et Lozeron. Il est seul avec deux enfants à gérer. Ses journées sont bien longues et ses nuits, bien trop courtes. La colère ronge parfois son quotidien. Entre l’école à la maison, les affaires courantes à gérer, son travail qui est la seule source de revenu et la fatigue... l’épuisement est proche.
Pour l’aider, pas de solution à l’horizon venant des institutions. Le producteur est désemparé : « Je ne rentre dans aucune case… Comme la plupart de mes collègues d’ailleurs. Alors, je dois me débrouiller et tout gérer ».
Bertrand a donc mis en place une organisation quasi-militaire : « Le matin, c'est école et l'après-midi, je travaille au jardin... quand je ne me fais pas sortir de ma propre parcelle par la Gendarmerie, parce que les enfants sont avec moi... J’ai deux fois plus de choses à faire dans la journée... C'est compliqué ».
Pour pallier à la fermeture des marchés qui représentaient une très grosse part de ses revenus, Bertrand a mis en place de nouvelles techniques de vente. Elles sont également très chronophages car elle nécessitent plus d’organisation, à cause des mesures actuelles : « J'ai "ouvert" mon jardin aux personnes du coin qui vont se servir de manière autonome. Elles pèsent leur récolte chez eux, et me régleront plus tard. Heureusement, j'ai quelques généreux voisins qui viennent me prêter main forte... En espérant que la Gendarmerie ne passera pas à ce moment-là. ».
Au niveau de la Mutuelle Sociale Agricole, l'attente est sans fin. Bertrand a fait une demande d’aide pour être secondé par un employé... Depuis trois semaines, il attend.
Le producteur est proche de l'épuisement. Il aide ses enfants de son mieux, pour leur permettre de reprendre l’école sans trop avoir décroché. Quand ils sont couchés, il répond aux messages des clients qui commandent par internet.
Ses journées se terminent aux alentours de 22h pour recommencer au lever du jour. Il essaIe quand même de relativiser : « Je travaille dehors, il fait beau et les gens ont peut-être pris conscience que le travail du producteur qui les nourrit, est essentiel. »
Propos recueillis par Corinne Lodier
Publié le 22 avril 2020