L’Humanité en marche ? Vraiment ?
La Misère silencieuse.
Thierry Yaacobi est décédé le 27 mars 2022 à la Condamine à Crest. Il avait 59 ans. Thierry avait été repéré par l’équipe du Banquet Trottoir auquel il avait participé lors de l’échange de légumes du marché et repas partagés qui se tenaient juste au-dessous de ses fenêtres.
Déjà très malade, amaigri, dénutri, sans ressources, une copine du Banquet l’avait amené en voiture au CCAS de Crest. Démarche qui ne connut aucune suite car pour toucher sa retraite, Thierry aurait dû se rendre à Valence avec moult papiers, ce qu’il était incapable de faire seul. La réponse du CCAS fut nette et sans bavure : « Point d’avance pécuniaire possible, il y a les restos du coeur pour ça ! (Mais les restos du coeur sont absents en été) et aucune assistante sociale n’est disponible avant 2 mois. Revenez donc ! »
Face à ce glacial accueil, Thierry n’osa pas renouveler l’expérience et replongea silencieusement dans sa désespérance.
Tandis que Fanny en voisine vigilante lui portait à manger tous les jours. Mais un jour il n’ouvrit pas sa porte et il ne l’ouvrit plus. Son décès fut constaté alors qu’il était mort depuis 3 jours dans la plus grande discrétion.
La tristesse submergea toute l’équipe du Banquet et son décès inspira les paroles d’une chanson. Ce samedi 16 avril, juste sous ses fenêtres, Gilles a saisi son accordéon pour entonner cette chanson souvenir.
« Thierry, Thierry, Thierry, te voilà reparti.
À peine le temps de se retrouver, déjà tu t’es envolé. C’était, il y a un an ou deux, autour de quelques légumes en vadrouille dans le quartier, on pousse la chansonnette avec les habitants des Condamines, tes voisin-es, copains et copines du Banquet et là, on se reconnaît.
25 ans après on se souvient de l’époque où tu venais faire les fêtes au Parc, juste en face de la Socar au son du tambour du Transe Express… Je me souviens de toi avec Gégé et Robertino, les longues soirées d’été à jouer du Djembé.
Aujourd’hui, tout le monde a déménagé.
Le Transe Express est parti à Eurre et toi, encore bien plus loin je crois.
Mais jamais deux sans trois Thierry, on se retrouvera bien encore une fois en attendant, cette chansonnette est pour toi ».
Signé Rhodoïd.
Le banquet en a profité pour partager ses petits plats apportés par les habitants (malgré le ramadan). La table précaire était fleurie pour le deuil porté par les voisines, voisins et la fine équipe du Banquet.
CB
Article publié dans Le Crestois du 22 avril 2022