Un Afghan égaré dans les méandres de l'administration
Depuis trois ans, Zabihullah désespère de voir sa femme le rejoindre à Crest.
Nous vous avions raconté son histoire il y a un peu plus d’un an de cela. Zabihullah Dawlazai, un réfugié afghan résidant à Crest, se démenait alors pour permettre à son épouse Hangama de le rejoindre en France alors que les talibans venaient de prendre le pouvoir à Kaboul.
Depuis 2020, il butait déjà sur des difficultés administratives en série, empêchant la venue de cette dernière dans la Drôme. Mais à la fin de l’été 2021, la situation semblait s’être améliorée et « Zabi », comme on le surnomme dans la vallée, où sa silhouette est devenue familière, avait bon espoir de voir sa demande de regroupement familial enfin acceptée par les services de l’État.
Malheureusement pour lui, le 9 mai 2022, il tombe de haut. Zabihullah vient de recevoir un courrier de la préfecture l’informant du rejet de sa demande de regroupement. Motif : ses ressources financières sont inférieures au Smic « et ne peuvent être considérées comme stables et suffisantes afin de subvenir aux besoins de sa famille », lui est-il indiqué.
Un argument qui fait bondir Zabihullah : « Je ne serais pas capable de subvenir aux besoins de mon épouse ?!, s’étrangle-t-il dans un français impeccable. Mais je travaille dans le bâtiment ! Je peux très bien m’occuper d’elle ! »
BLOQUÉE AU NORD DE KABOUL
« Aujourd’hui, poursuit-il, le seul vrai problème, c’est qu’elle n’est pas en sécurité en Afghanistan ! » Hangama est en effet bloquée dans la province de Baghlân, au nord Kaboul, auprès de la famille de Zabihullah. Une zone tombée sous le joug des talibans le 15 août 2021. Et Zabihullah redoute que ces derniers ne s’en prennent à elle. D’autant que les talibans ont déjà fait couler le sang dans cette famille qui possède une entreprise importante à Baghlân : deux de ses oncles ont été assassinés par ces miliciens fanatiques.
Dès lors, le rejet de sa demande de regroupement lui paraît tout à fait incompréhensible. « Pourquoi me font-ils ça ? Qu’est-ce que nous leur avons fait ?, se désespère-t-il. Je suis honnête, je travaille, j’ai un logement avec de la place pour elle... »
Sollicitée par le Crestois pour savoir si des dispositifs adaptés aux spécificités afghanes existaient, la préfecture de la Drôme n’a pas donné suite. Aujourd’hui, Zabihullah ne semble avoir d’autre choix que de lancer une nouvelle demande pour espérer voir un jour son épouse le rejoindre dans la Drôme.
Visiblement très éprouvé par ce long chemin de croix administratif, Zabihullah a les yeux qui s’embuent à cette perspective. « Combien d’années faut-il qu’elle reste en danger chez les talibans pour avoir le droit de venir en France ?, demande-t-il, dépité. On aura beau faire tout ce qu’on peut, ils trouveront toujours un petit détail pour refuser notre dossier... »
En désespoir de cause, Zabihullah en appel à quiconque serait en mesure de lui venir en aide.
Martin Chouraqui
Coordonnées :
Zabihullah Dawlatzai 06 58 01 01 69 18
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Article publié dans Le Crestois du 28 octobre 2022