Springsteen on Broadway
Que manquait-il à la carrière de Bruce Springsteen ? Pas grand chose, sans doute. Et pourtant...
À presque 70 ans, le rocker a encore surpris son monde, en 2018, en prenant résidence dans un théâtre de Broadway : 236 spectacles de 2 heures, durant presque un an, à raison de cinq soirs par semaine ! Une prouesse artistique (et physique, vu son âge) qui lui a valu un Tony Award (prestigieuse récompense théâtrale américaine).
Voir un artiste de la stature de Springsteen dans une salle de seulement 900 sièges a été un tel événement que le spectacle a affiché complet tous les soirs et le prix des places s’est envolé au marché noir. Mais loin du strass et des paillettes habituels sur Broadway, c’est un spectacle intimiste et émouvant qu’a proposé l’artiste, à mi-chemin entre concert acoustique et one-man show, dans un décor épuré (un mur de brique rouge dans le fond, quelques “flight cases” disséminés ça et là, une guitare et un piano à queue).
Et pendant deux heures, Springsteen se raconte, dans des monologues parfois plus longs que les chansons elles-mêmes. Il commence son spectacle par un aveu : il est un escroc. Lui qui a écrit sur les usines de l’Amérique profonde n’a jamais travaillé de sa vie. Lui qui a dit être né pour courir le vaste pays (Born to run) habite toujours dans son New Jersey natal, à quelques centaines de mètres à peine de sa maison d’enfance.
On découvre une facette nouvelle de l’artiste : un formidable conteur qui nous déroule, avec beaucoup de sincérité, de pudeur et d’auto-dérision, toute son enfance, l’importance de la famille, l’omniprésence de la religion catholique, ses doutes, ses failles...
Ce spectacle, diffusé sur Netflix et intégralement sous-titré en français, est un vrai bonheur à regarder. Un des spectacles les plus convaincants et les plus profonds jamais donnés par un musicien de rock. Plus que jamais, Bruce mérite son surnom : le boss.
Philippe Multeau
Springsteen on Broadway
Disponible en version sous-titrée VF sur Netflix
Article publié dans Le Crestois du 6 novembre 2020