Tina Turner, la reine-mère du rock
Après 63 ans de règne, la grande Tina s'en est allée réveiller les anges.
Le couperet est tombée le 24 mai 2023, Tina Turner dont la voix a fait vibrer au moins trois générations, est morte. Mais au-delà de la chanteuse, c’est aussi la femme qu’il convient de célébrer. Qui dans les années 70, alors qu’elle se hissait en haut des hit-parade avec Proud mary (pour lequel elle reçu un Grammy award) en compagnie de son mari et bourreau Ike Turner, pouvait s’imaginer qu’elle vivait l’enfer dans sa vie conjugale ?
Mais au bout de dix ans de bagne, et deux enfants, elle a eu le courage de s’enfuir avec 36 cents. Et pour couronner le tout, ayant abandonné une tournée pour sauver sa vie, la « bête de scène » qu’elle fut a dû rembourser toutes les dettes inhérentes à l’annulation de ces concerts.
Mais c’était sans compter sa force de détermination et son énergie débordante. En 1983, après sept ans de traversée du désert, elle revient avec Let’s stay together qui atteint la cinquième place dans les Charts anglais. À 45 ans, son cinquième album, Private dancer, se vend à huit millions d’exemplaire, dans lequel elle interprète avec puissance et retenue le fameux What’s love got to do it. Titre moins rock mais emblématique de toute la tessiture de jeu que l’artiste pouvait avoir.
C’est à la suite de cette remontada historique qu’elle s’est faite actrice dans Mad Max - où elle apparaît en diva futuriste, au côté de Mel Gibson. Evidemment, elle interprètera le titre phare du film, We dont’ need another hero, qui deviendra lui aussi un tube.
La liste de ses succès est trop longue pour qu’elle soit exhaustive. Il y aurait aussi Simply the best ou Golden eye, bande-originale d’un James Bond éponyme.
La reine-mère du rock sortira son neuvième et dernier album, Twenty four seven, en 1999. Mais ce n’était pas la fin de sa carrière. En 2008- 2009, à 70 ans, elle effectue sa dernière tournée mondiale, qui sera vue par un million de personnes entre l’Amérique du Nord et l’Europe.
Cette femme dont la force émanait sur scène (elle a aussi perdu ses deux enfants), a ouvert la voix du rock et du succès international - jusque-là réservé aux hommes - aux femmes, pas très nombreuses, et plus particulièrement aux femmes noires, encore moins nombreuses. Grâce à sa notoriété, et avant #meetoo, elle a aussi permis à des femmes battues de trouver le courage de quitter leurs bourreaux pour mieux se reconstruire.
Tina Turner c’était une voix, des jambes (mythiques), mais surtout un être qui, comme l’a dit Oprah Winfrey, « n’a pas seulement survécu, elle a triomphé ».
Laure-Meriem Rouvier
Article publié dans Le Crestois du 2 juin 2023