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Le Crestois en redressement judiciaire

Confrontée à des difficultés financières, l'entreprise a demandé au tribunal de commerce son placement en redressement judiciaire le 14 mars.

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L’imprimerie du Crestois en 1920

Il y a des articles plus difficiles que d’autres à écrire et celui-ci en fait partie. Le 2 septembre 2022, nous vous avions parlé de nos difficultés financières dans un article intitulé « Vous avez le destin du Crestois entre vos mains ». Depuis six mois, la situation ne s’est pas arrangée et j’ai dû me contraindre à demander, au tribunal de commerce de Romans-sur-Isère, le placement de mon entreprise en redressement judiciaire avec une période d’observation de six mois.

VOS "AMIS" VOUS FUIENT COMME LA PESTE

Depuis quinze jours, j’enchaîne les rendez-vous avec les avocats, administrateurs et mandataires. Les volumes de documents à fournir sont sidérants et vos « amis » d’avant (banquiers, commerciaux...) vous fuient comme la peste. Bref, vous êtes tout seul dans le merveilleux monde du redressement judiciaire.

Une situation d’autant plus désagréable que vos problèmes financiers ne sont pas dus à une mauvaise gestion mais au contexte économique. Les crises de ces dernières années ont été comme des coups de boutoir sur les finances de l’entreprise, m’empêchant de réinvestir dans l’appareil productif. Nos efforts depuis quinze ans, bien que colossaux pour une petite entreprise comme la nôtre, n’ont pas suffi à contrer la baisse d’activité et l’érosion des marges. À titre personnel, je n’ai pas pris de vacances depuis dix ans et travaillé sans salaire pendant plusieurs mois pour essayer de sauver l’entreprise.

Malheureusement, cela n’a pas suffi, il me restait donc deux options. La première : s’entêter et continuer coûte que coûte, au risque de voir disparaître l’imprimerie et le journal pour toujours. La seconde : accepter la situation et demander la protection du tribunal pour pouvoir sauver une partie de l’entreprise. Un profond dilemme entre mon coeur et ma tête. Mon coeur, me suppliant de continuer l’aventure, ma tête me hurlant d’arrêter... J’ai choisi d’écouter ma tête, tout en sachant que cette procédure signait la fin d’une histoire familiale vieille de 123 ans, n’ayant plus les moyens de réinvestir dans l’entreprise.

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LA FIN D’UNE HISTOIRE FAMILIALE

La fin de mon histoire familiale ne signifie pas forcément la fin de l’entreprise. D’autres entrepreneurs peuvent se porter acquéreurs de la société et déposer une offre de reprise au tribunal. L’administrateur judiciaire diffusera, dès le mois d’avril, deux offres de reprise. La première pour l’imprimerie et la seconde pour la journal.

Je ne crois pas à une offre de reprise globale pour l’imprimerie. Mes confrères vivent les mêmes difficultés que moi et sont confrontés à une concurrence féroce (déloyale ?) de la part d’Internet. Le monde de l’imprimerie est en guerre depuis de trop nombreuses années et les petites structures sont vouées à disparaître. Sans offre de reprise, l’Imprimerie du Crestois sera liquidée, ses salariés licenciés et ses machines vendues aux vautours. Ça me fend le coeur mais il faut que je l’accepte. Le métier est en profonde mutation et il n’y a de place que pour les très gros industriels, pouvant réinvestir une part conséquente de leur chiffre d’affaires dans le renouvellement de leurs machines. Une véritable course à l’armement où les petits sont broyés par les gros.

LES PETITS SONT BROYÉS PAR LES GROS

Pour moi, seul le journal a encore un avenir et peut intéresser de potentiels acquéreurs. C’est d’ailleurs le projet que portent mes journalistes. Travaillant intensivement sur le sujet depuis des mois, ils se sont montés en Scop (Société coopérative de production) et font une levée de fonds pour permettre de racheter Le Crestois à la barre du tribunal (lire notre article). La procédure en cours m’empêchant de m’investir à titre personnel dans ce projet pour ne pas nuire à un autre acquéreur, je leur souhaite beaucoup de réussite dans ce projet.

Mais ce projet peut aussi devenir le vôtre. Le statut de Scop permet d’ouvrir l’entreprise à toutes les personnes concernés par l’avenir du journal. Le Crestois deviendrait un bien commun, en quelque sorte.

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LE CRESTOIS DEVIENDRAIT UN BIEN COMMUN

Pendant 123 ans, ma famille a veillé sur ce journal et c’est à moi, la cinquième génération, que revient la lourde décision de transmettre la protection de cette institution à d’autres. Ce n’est pas un choix évident pour moi mais vous avez, chers lecteurs, toute ma confiance car je sais qu’avec vous, Le Crestois sera sous bonne garde.

Jean-Baptiste Bourde

Article publié dans Le Crestois du 31 mars 2023

À lire également : La Scop du Crestois lance un emprunt solidaire

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